L’agir au lieu de l’esprit
Resumo
D’ordinaire, on parle plus volontiers de « l’esprit d’un lieu » que d’«
un lieu de l’esprit », formule qui peut sonner étrangement aux oreilles
du sens commun. L’esprit d’un lieu relève de sa composition, naturelle
ou artificielle, des impressions affectives qu’il suscite, des émotions
qu’il provoque : on enjoint souvent de respecter ou sauvegarder
l’esprit d’un lieu, qui devient lieu patrimonial, sanctuarisé. L’esprit
du lieu tient certes à la subjectivité qui est affectée par le lieu, mais
semble appartenir surtout au lieu lui-même : ce serait avant tout le
lieu qui fait son esprit, c’est-à-dire les sentiments, les idées, l’histoire
qu’il enveloppe. Penser en revanche l’existence de lieux de l’esprit,
c’est partir plutôt de l’esprit comme une donnée de fait, comme
une réalité, dont on se demande où elle peut bien s’incarner, en quel
lieu privilégié elle pourrait être appréhendée. Le lieu de l’esprit serait
comme la localisation, ou la spatialisation sensible de l’esprit – réalité
caractérisée pourtant, bien souvent, comme insensible, inétendue ou
immatérielle.
Si donc l’esprit n’est